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Artistes Auteurs et CFE : Une nouvelle donne pour 2024 ?

Fiche expert

La contribution foncière des entreprises, CFE, est un impôt souvent considéré comme lourd et injuste.

Heureusement les artistes auteurs en sont dégrevés… Mais malheureusement pas tous, et différemment selon les centres des impôts et les différentes activités.

Une extension du champ d’application de l’exonération de la CFE promulguée par la loi de finance 2024 vient changer la donne.

Petite explication de la problématique, des cas de rejets rencontrés et du changement favorable survenu en 2024.

Artistes Auteurs et CFE : Une nouvelle donne pour 2024 ?

I. C’est quoi la CFE

La cotisation foncière des entreprises (CFE) est un impôt local dû par toute entreprise et personne exerçant une activité professionnelle non salariée, sauf exonération éventuelle. Elle constitue avec la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), l’une des 2 composantes de la contribution économique territoriale (CET).

La cotisation foncière des entreprises doit être réglée par les sociétés et par les entrepreneurs individuels (dont micro-entrepreneurs), y compris ceux exerçant leur activité à domicile ou chez leurs clients.

Pour être redevable de la CFE, l’activité du contribuable doit remplir les conditions suivantes :

  • L’activité est exercée en France
  • L’activité présente un caractère habituel : elle est exercée de manière répétée.
  • L’activité est exercée à titre professionnel : cela exclut les activités sans but lucratif et les personnes qui se limitent à la gestion de leur patrimoine privé.
  • L’activité est non salariée : les salariés ne sont pas concernés par la CFE

II. Le dégrèvement pour les auteurs

L’article 1460-2 du CGI dispose des exonérations suivantes dans les activités artistiques :

Les personnes et organismes suivants sont exonérés de CFE de plein droit et de manière permanente :

  • Peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs considérés comme artistes et ne vendant que le produit de leur art. Cela inclut les graphistes à condition que leur activité soit limitée à la création d’œuvres graphiques.
  • Photographes auteurs, pour leur activité relative à la réalisation de prises de vues et à la cession de leurs œuvres d’art ou de droits d’auteur
  • Auteurs, compositeurs, chorégraphes, traducteurs percevant des droits d’auteur, et certaines catégories d’entrepreneurs de spectacles (spectacles vivants)

III. Les cas de rejets

Depuis longtemps, les impôts se basent sur leur vision restrictive de ce qu’est une œuvre d’art et refusent l’assimilation avec toute appartenance au régime de la sécurité sociale des artistes auteurs.

Rappelons qu’on retrouve la définition de ce qu’est une œuvre d’art ni dans le code de la propriété intellectuelle ni dans le régime de la sécurité sociale des artistes auteurs, mais uniquement dans le code général des impôts.

A. Définition retenue par l’administration fiscale

L’article 98 A de l’annexe III au CGI définit les réalisations constituant des œuvres d’art.

=> Tableaux, collages et tableautins similaires, peintures et dessins, entièrement exécutés à la main par l’artiste.

Sont considérés comme œuvres d’art, les tableaux, collages et tableautins similaires, peintures et dessins, entièrement exécutés à la main par l’artiste, à l’exclusion des dessins d’architectes, d’ingénieurs et autres dessins industriels, commerciaux, topographiques ou similaires, des articles manufacturés décorés à la main, des toiles peintes pour décors de théâtre, fonds d’ateliers ou usages analogues.

Cette énumération recouvre les peintures à l’huile, à l’aquarelle, à la gouache, au pastel, les dessins, les collages et tableautins similaires, ainsi que les monotypes, quelle que soit la matière utilisée comme support. Mais il faut que ces productions aient été créées de la main de l’artiste, ce qui exclut l’emploi de tout procédé, quel qu’il soit, permettant de suppléer, en tout ou en partie, à cette intervention humaine. Les copies des œuvres susvisées bénéficient également du régime des œuvres d’art, sous réserve qu’elles soient faites entièrement à la main.

Par monotype, il faut entendre l’empreinte unique obtenue par pression sur une feuille de papier d’une œuvre peinte en noir ou en couleurs, généralement sur cuivre ou sur verre et exécutée dans les conditions ci-dessus.

En revanche, ne sont pas considérés comme œuvres d’art :

  • les productions obtenues par des procédés mécaniques ou à l’aide de caches ou de pochoirs ;
  • les dessins et croquis originaux de modes, bijouterie, carrosseries automobiles, meubles, etc., et, d’une manière générale, tous les dessins et croquis exécutés à des fins industrielles ;
  • les articles manufacturés ornés à la main (souvenirs de voyages, boîtes et coffrets, articles en céramique, etc.).

=> Gravures, estampes et lithographies originales

Sont classées dans les œuvres d’art, les gravures, estampes et lithographies originales, tirées en nombre limité directement en noir ou en couleurs, d’une ou plusieurs planches entièrement exécutées à la main par l’artiste, quelle que soit la technique ou la matière employée, à l’exception de tout procédé mécanique ou photomécanique. Les gravures, estampes et lithographies originales sont des épreuves tirées, en noir ou en couleurs, d’une ou plusieurs planches entièrement conçues et exécutées à la main par le même artiste.

Les gravures sont généralement exécutées en taille-douce, au burin, à la pointe sèche, à l’eau-forte, au pointillé.

Seules les épreuves répondant à ces conditions ont droit à l’appellation « œuvres originales ».

En ce qui concerne le tirage limité, il est à noter que, d’une manière générale, les artistes éditeurs limitent le tirage des gravures, lithographies et estampes ; celui-ci n’excède pas quelques centaines et le numérotage n’est pas constamment pratiqué. Dès lors, il n’a pas paru opportun de fixer une limite précise. Ainsi, c’est seulement dans le cas de tirages excessifs, par rapport aux usages normaux de la profession, que le régime des œuvres d’art serait refusé à ces productions.

En tout état de cause, la qualité d’œuvre d’art n’est pas reconnue aux gravures, estampes et lithographies réalisées par un procédé mécanique ou photomécanique, même si ces reproductions sont numérotées et signées par l’artiste ; il en va de même pour les tirages par planches, plaques ou cylindres d’imprimerie.

=> Productions originales de l’art statuaire et de la sculpture

Sont considérées comme œuvres d’art, les productions originales de l’art statuaire ou de la sculpture en toutes matières, à l’exception des articles de bijouterie, d’orfèvrerie et de joaillerie, dès lors que les productions sont exécutées entièrement par l’artiste. Sont également considérées comme œuvres d’art, les fontes de sculpture à tirage limité à huit exemplaires et contrôlé par l’artiste ou ses ayants droit. Les assemblages artistiques sont également considérés comme des œuvres d’art.

Ces productions sont parfois obtenues par taille directe dans des matières dures. Lorsque l’artiste réalise des modèles en matière molle (maquette, projet, modèle plâtre) destinés soit à être durcis au feu, soit à être reproduits en matières dures, soit à confectionner des moules pour la fonte de métal ou d’autres matières, ces maquettes, projets, modèles plâtre sont réputés également œuvres d’art.

Sont également considérées comme œuvres d’art, les fontes de sculpture exécutées à partir d’un moulage de la première œuvre, sous réserve que leur tirage soit contrôlé par l’artiste ou ses ayants droit et limité à huit exemplaires numérotés. Les tirages dits « d’artiste » portant des mentions spéciales sont admis au même régime dans la limite de quatre exemplaires.

La condition du numérotage n’est exigée que pour les fontes exécutées depuis le 1er janvier 1968.

En revanche, la qualité d’œuvre d’art doit être refusée :

  • aux moules pour fontes de sculpture ;
  • aux productions artisanales ou de série ainsi qu’aux œuvres exécutées par des moyens mécaniques, photomécaniques ou chimiques. Il en est ainsi notamment des articles de bijouterie, d’orfèvrerie et de joaillerie.

Tapisserie Textiles Muraux CFE

=> Tapisseries et textiles muraux

Sont réputés œuvres d’art, les tapisseries et textiles muraux faits à la main, sur la base de cartons originaux fournis par les artistes, à condition qu’il n’existe pas plus de huit exemplaires de chacun d’eux.

Sont des œuvres d’art, les tapisseries en tous textiles, présentées, en général, sous forme de panneaux, et tissées à la main sur métier de haute ou basse lisse ou exécutées à l’aiguille sur canevas d’après des maquettes ou cartons conçus par l’artiste ainsi que les textiles muraux. Le tirage doit être contrôlé par l’artiste ou par ses ayants droit et limité à huit exemplaires y compris les exemplaires d’artiste ; chacun d’eux doit porter un numéro intégré dans le tissage. Cette condition de numérotage n’est exigée que pour les productions réalisées depuis le 1er janvier 1968.

La qualité d’œuvre d’art ne doit pas être accordée aux tapisseries obtenues par des procédés mécaniques, ni aux articles confectionnés au moyen de tapisseries (sacs, coussins, etc.).

=> Céramiques

Sont considérés comme œuvres d’art, les exemplaires uniques de céramique entièrement exécutés par l’artiste et signés par lui.

La réalisation de ces objets nécessite la préparation d’une pâte et sa mise en forme. Il est ensuite procédé à la cuisson puis à la finition et à la décoration de l’objet façonné.

Les céramiques sont considérées comme des œuvres d’art s’il s’agit d’exemplaires uniques entièrement réalisés par la main de l’artiste et signés par lui, à l’exclusion des articles manufacturés, même s’ils sont décorés et signés par l’artiste. L’artiste doit exécuter personnellement les opérations successives nécessaires à la confection de l’objet (mise en forme, cuisson, décoration).

=> Émaux sur cuivre

Sont considérés comme des œuvres d’art, les émaux sur cuivre entièrement exécutés à la main, dans la limite de huit exemplaires numérotés et comportant la signature de l’artiste ou de l’atelier d’art, à l’exclusion des articles de bijouterie, d’orfèvrerie et de joaillerie.

Chacun des exemplaires doit être numéroté et comporter la signature de l’artiste ou de l’atelier d’art.

Sont exclus du bénéfice de cette mesure, les articles de bijouterie, d’orfèvrerie et de joaillerie tels que bagues, médaillons, colliers, boutons de manchette, cendriers, etc.

Photographe CFE=> Photographies d’art

Sont considérées comme œuvres d’art, les photographies prises par l’artiste, tirées par lui ou sous son contrôle, signées et numérotées dans la limite de trente exemplaires, tous formats et supports confondus.

Ne peuvent être considérées comme des œuvres d’art que les photographies qui portent témoignage d’une intention créatrice manifeste de la part de leur auteur.

Tel est le cas lorsque le photographe, par le choix du thème, les conditions de mise en scène, les particularités de prise de vue ou toute autre spécificité de son travail touchant notamment à la qualité du cadrage de la composition, de l’exposition, des éclairages, des contrastes, des couleurs et des reliefs, du jeu de la lumière et des volumes, du choix de réaliser un travail qui dépasse la simple fixation mécanique du souvenir d’un évènement, d’un voyage ou de personnages et qui présente donc un intérêt pour tout public.

L’intention créatrice de l’auteur peut être confortée lorsqu’il justifie de l’exposition de ses œuvres dans des institutions culturelles (régionales, nationales ou internationales), muséales (musées, expositions temporaires ou permanentes) ou commerciales (foires, salons, galeries, etc…). La preuve de ces expositions ou présentations peut être apportée par tous moyens, indépendamment du volume d’affaires réalisées par le photographe. A cet égard, l’affiliation à la Sécurité Sociale des Artistes Auteurs est significative car elle témoigne de la démarche d’auteur du photographe. Elle n’est toutefois pas suffisante pour conférer, par elle-même, aux travaux photographiques, le caractère d’œuvre d’art.

Il résulte de ce qui précède que les photographies dont l’intérêt dépend avant tout de la qualité de la personne ou de la nature du bien représenté, ne sont pas, d’une manière générale, considérées comme des photographies d’art. Tel est le cas, par exemple, des photographies illustrant des évènements familiaux ou religieux (mariages, communions, etc.), des photographies d’identité, des photographies scolaires ainsi que des photos de groupe.

Les épreuves photographiques doivent être signées (ou authentifiées) par l’artiste lui-même. La signature ou l’authentification par les ayants droit de l’artiste ne peut pas conférer à une photographie le caractère d’ œuvre d’art.

B. Les cas de rejets

Depuis des années, les graphistes étaient dégrevés et ce plutôt par méconnaissance des contrôleurs des impôts. Puis sont apparus des rejets de plus en plus nombreux et enfin des arrêts de jurisprudence à l’encontre de graphistes dans la publicité ou les media où l’administration gagnait en mettant en avant la notion d’œuvre de commande ou tout simplement que le graphisme n’entrait pas dans la définition d’une œuvre d’art.

IV. L’extension 2024

Sans crier gare, l’article 148 de la loi de finances pour 2024 propose une extension à l’ensemble des activités contemporaines d’écriture et à la notion d’œuvres graphiques et plastiques.

Pire encore, dans son art 1460-2, elle précise « Auteurs graphiques et plastiques mentionnés à l’art L 382 -1 du code de la sécurité sociale ».

Elle crée donc, enfin, une connexion entre l’exonération fiscale de la CFE et l’appartenance sur une liste sociale des activités artistiques !

Mais observons de près qui est concerné par l’art L382-1 du code de la sécurité sociale :

« Les artistes auteurs d’œuvres littéraires et dramatiques, musicales et chorégraphiques, audiovisuelles et cinématographiques, graphiques et plastiques sont affiliés obligatoirement au régime général de la sécurité sociale pour les assurances sociales et bénéficient des prestations familiales dans les mêmes conditions que les salariés.

Il est désormais clair que, quel que soit le domaine d’intervention et la notion d’œuvre de commande, la simple appartenance au régime de la sécurité sociale des artistes auteurs permet une exonération de droit de la cotisation foncière des entreprises.

Conclusion

Attendue depuis longtemps, cette convergence fiscale et sociale est un grand soulagement pour beaucoup… mais attention uniquement à partir du 1er janvier 2024.

Il est certain que des contrôleurs des impôts n’auront pas perçu ce texte comme ceci et qu’il faudra encore quelques années pour ne plus avoir à se battre.

J’attire également l’attention sur le cas des photographes qui semble moins réglé par cette extension. Je pense plus particulièrement aux photographes dans la publicité et les media qui cèdent leur droit de reproduction. Ils sont bien reconnus par la sécurité sociale des artistes auteurs mais la vision fiscale d’exonération de la CFE semble plutôt s’orienter vers des tirages d’art.

Des précisions futures seront les bienvenues pour éclaircir ce dernier point.

Pour en savoir plus sur la problématique des freelances et la CFE lire aussi :

Activités artistiques et CFE : le cache-cache fiscal/a>
Questionnaire des impôts concernant l’assujettissement des Artistes Auteurs à la Cotisation Foncière des Entreprises

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Une reconnaissance officielle de compétence spécialisée :

En décembre 2020, Eric HAINAUT, associé-fondateur, a eu l’honneur de se voir reconnaitre officiellement la compétence spécialisée en activités culturelles, créatives et artistiques par l’Ordre des Experts-Comptables d’Ile-de-France.