Artistes Auteurs : Comment expliquer à vos clients l’intérêt d’acheter une œuvre d’art ?
Souvent l’artiste auteur qui approche un professionnel se retrouve confronté à la question de l’optimisation fiscale pour l’acheteur dans l’acquisition de ses œuvres.
Cet acte ne constitue pas une opération fréquente d’autant que l’acheteur aimerait y trouver un avantage fiscal en plus de celui d’acheter une œuvre qui lui plaît.
Cette fiche vous servira à apporter des précisions et une « touche » commerciale afin de motiver davantage vos futurs clients.
Si elle peut s’avérer complexe, c’est d’une part parce que le sujet l’est et d’autre part parce qu’elle s’adresse au dirigeant/client auprès de qui vous souhaitez vendre votre œuvre.
Pour vous, la cession de l’œuvre ne constitue qu’une activité courante de votre activité et donc du chiffre d’affaires.
I. Le traitement comptable d’une œuvre d’art
- Classement comptable
Les motivations justifiant l’achat d’œuvre d’art par un non professionnel (marchand d’objets d’art) peuvent être multiples et variables dans le temps (placement d’argent, image de marque, simple décoration, objectif fiscal…).
Quelles que soient celles-ci, l’œuvre est identifiable et contrôlée, son coût est déterminable de manière fiable et elle peut être cédée ultérieurement. Elle répond donc à la définition d’un actif. Elle constitue une immobilisation corporelle à constater en « autres immobilisations corporelles ».
- Évaluation initiale
Les immobilisations corporelles acquises à titre onéreux sont évaluées initialement à leur coût d’acquisition et celles produites à leur coût de production.
- Évaluation postérieure
- Amortissement :
La durée d’utilisation d’une œuvre d’art n’étant pas, en principe, déterminable, elle ne donne pas lieu à amortissement. Toutefois, si une œuvre se détériore inexorablement avec le temps ou est utilisée pour une durée déterminée, elle doit être amortie selon les modalités prévues par le Plan Comptable Général (PCG).
Dans le cas où l’œuvre nécessite des travaux pluriannuels de restauration ou de rénovation sans prolongation de la durée de vie prévue initialement, ces dépenses sont comptabilisées sous forme de provisions pour gros entretien ou de composants. Les dépenses contribuant à accroître la valeur de l’œuvre doivent être immobilisées.
- Dépréciation :
A la clôture de chaque exercice, l’entité propriétaire d’une œuvre d’art doit déterminer s’il existe un indice quelconque montrant que celle-ci a pu perdre notablement de la valeur. La baisse généralisée des prix sur le marché de l’art, le déclin de la cote de l’artiste ou la détérioration physique de l’œuvre pourraient constituer des indices suffisants.
En l’absence d’indice, aucune dépréciation n’est à constater.
Dans le cas inverse, le test de dépréciation, qui consiste à comparer la valeur actuelle de l’œuvre à sa valeur nette comptable, doit être effectué et le cas échéant, une dépréciation sera enregistrée.
La valeur actuelle d’un actif est la valeur la plus élevée de la valeur vénale ou de la valeur d’usage. Une œuvre d’art étant unique ou limitée à un très faible nombre d’exemplaires, sa valeur vénale n’est pas aisément déterminable de manière fiable.
Si elle se situe à un niveau supérieur à Ia valeur nette comptable, aucune dépréciation est à constater. Si elle est Inférieure, il convient de déterminer la valeur d’usage, excepté dans le cas où l’entité s’est engagée à la céder ; dans cette situation, la valeur vénale constitue la valeur actuelle.
La valeur d’usage d’un actif est la valeur des avantages économiques futurs attendus de son utilisation et de sa sortie. Elle est, en général, déterminée en fonction des flux nets de trésorerie attendus ; toutefois, si ces derniers ne sont pas pertinents pour l’entité, d’autres critères devront être retenus pour évaluer les avantages futurs attendus.
Si l’entité, propriétaire de l’œuvre, ne s’est pas engagée à la céder ou la donner en location, les avantages économiques futurs attendus ne sont pas déterminables.
La question de la méthodologie à adopter pour définir la valeur d’usage se pose.
Selon nous, un raisonnement similaire à ce qui est prévu en matière de titres de participation, pourrait être envisagé, à savoir évaluer l’œuvre à sa valeur d’utilité représentant ce que l’entité accepterait de décaisser pour I ‘obtenir si elle devait l’acquérir.
Si I ‘utilité d’origine n’a pas varié, aucune dépréciation ne serait à constater. La communication de la valeur vénale de l’œuvre, si celle-ci est déterminable et significative pourrait constituer une information pertinente en annexe.
II. Le traitement fiscal d’une œuvre d’art
Les œuvres d’art bénéficient, en droit français, d’une fiscalité, à la fois spécifique et attractive, pour les entreprises pour inciter les actes de mécénat et de soutien à I ‘art. Plusieurs régimes, non cumulables, coexistent.
- Règles applicables en matière de détermination du résultat imposable
- Déduction du résultat imposable des acquisitions d’œuvres originales d’artistes vivants
Les entreprises qui achètent depuis le 1er janvier 2002, des œuvres originales d’artistes vivants et les inscrivent à un compte d’actif immobilisé, peuvent déduire une somme égale au prix d’acquisition, à certaines conditions et de manière extra-comptable, du résultat imposable de l’exercice d’acquisition et des quatre années suivantes, par fractions égales.
La déduction ainsi effectuée au titre de chaque exercice ne peut excéder la somme de 5 pour mille du chiffre d’affaires, diminuée des versements effectués au titre des dons aux œuvres. La fraction, ainsi déduite, doit être affectée à un compte de réserve.
Le cas échéant, lorsque la fraction du prix d’acquisition n’a pas pu être totalement déduite au cours d’un exercice, l’excédent non déduit ne peut pas être reporté et déduit ultérieurement. Dans le cas où le résultat fiscal d’un exercice est déficitaire, aucune déduction ne peut être effectuée.
Pour bénéficier de la déduction, l’entreprise doit exposer dans un lieu accessible au public ou aux salariés, à l’exception de leurs bureaux, le bien qu’elle a acquis pour la période correspondant à l’exercice d’acquisition et aux quatre années suivantes.
La somme antérieurement déduite est réintégrée au résultat imposable, en cas de changement d’affectation, de cession de l’œuvre ou de prélèvement sur le compte de réserve. L’entreprise peut constituer une provision pour dépréciation de l’œuvre lorsque celle-ci excède le montant des déductions déjà opérées.
- Réduction d’impôt pour I ‘achat de biens culturels présentant le caractère de trésors nationaux
Ouvrent droit à une réduction d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés égale à 40 % de leur montant, les sommes consacrées par les entreprises à l’achat de biens culturels faisant l’objet, à la date d’acquisition, d’un refus de certificat en application des articles L. 111 -4 el L. 121-1 du code du patrimoine, dans les conditions suivantes :
- Le bien ne doit pas avoir fait l’objet d’une offre d’achat de I ‘Etat dans les conditions
fixées par l’article L. 121-1 précité ;
- L’entreprise s’engage à consentir au classement du bien comme monument historique en application de l’article L.622-4 du code du patrimoine ou comme archives historiques en application de l’article L.212-15 du même code ;
- Le bien ne doit pas être cédé avant l’expiration d’un délai de dix ans à compter de
l’acquisition ;
- Durant la période, le bien doit être placé en dépôt auprès d’un musée de France, d’un service public d’archives ou d’une bibliothèque relevant de l’État ou placée sous son contrôle technique.
La réduction d’impôt est subordonnée à l’agrément du ministre de l’économie et des finances qui se prononce après avis motivé d’une commission composée à parité, de représentants de l’Etat et de personnalités qualifiées, et présidée par un membre du Conseil d’État.
- Amortissement et dépréciation
En principe, Ia durée d’utilisation d’une œuvre d’art n’est pas déterminable ; elle ne peut donc pas être amortie.
Toutefois, en cas d’utilisation pour les besoins de l’activité générant une dépréciation, un amortissement doit être pratiqué, sous réserve d’apporter la preuve de cette dernière.
Pour être déductible, une dépréciation sera constatée par expert agréé auprès des tribunaux si le coût d’acquisition de l’œuvre est supérieur à 7600 €.
Les dépréciations relatives aux œuvres d’artistes vivants ne sont déductibles que pour la fraction qui excède la déduction pratiquée au titre du mécénat.
- Cessions
Les cessions réalisées par des professionnels relevant de I ‘impôt sur le revenu selon les dispositions de droit commun ou de I ‘impôt sur les sociétés, dépendent du régime d’imposition des plus-values professionnelles. Elles ne sont pas soumises à la taxe sur les objets et métaux précieux, qui constitue une modalité particulière d’imposition des plus-values réalisées essentiellement par les particuliers et les associations, dès lors que le bien vendu est inscrit à l’actif de l’entreprise.
- Règles applicables en matière de TVA
- Régime général
Les cessions d’œuvres d’art sont en principe soumises au taux normal de TVA (20 %). Toutefois, les livraisons d’œuvres d’art effectuées par leurs auteurs (peintres, sculpteurs…) ou leurs ayants droits relèvent du taux réduit de TVA (10 %) lorsqu’ils ne sont pas couverts par la franchise en base.
Ce taux s’applique au prix de vente hors taxe de l’œuvre.
- Régime de Ia TVA sur la marge réelle ou forfaitaire de 30 %
Ce régime spécifique ne s’applique qu’aux cessions réalisées par des assujettis revendeurs qui achètent des œuvres d’art en vue de les revendre.
III. Votre client / Votre discours
Arrive dans les échanges avec votre futur client acheteur, le moment de le motiver autant sur les qualités artistiques de votre œuvre plastique, votre peinture, votre installation ou votre tirage photographique que sur les intérêts fiscaux de cette opération.
Vous pouvez remettre la fiche ci-jointe et expliquer brièvement que même si l’œuvre n’entre pas dans l’objet social de l’entreprise, des mesures fiscales incitatives permettent aux entrepreneurs d’acheter de l’art et de bénéficier de réductions d’impôts.
Ces mesures, légiférées de façon précise et à condition d’en respecter les conditions, ne sont jamais remises en question par l’administration fiscale.
« Alors faites-vous plaisir et investissez en faisant des économies d’impôts. En plus vous réalisez une opération de communication tant pour vos collaborateurs que pour vos clients »
De votre côté, vous prendrez soin d’émettre une facture avec toutes les mentions obligatoires, en respectant votre fiscalité (TVA ou pas) et surtout en précisant le descriptif de l’œuvre.
Attention, vendre son œuvre ne signifie pas vendre les droits de la reproduire : l’acheteur ne peut pas modifier votre œuvre (d’où l’intérêt d’en garder pour vous une photographie) et il doit également l’entretenir.
CONCLUSION
Vendre une œuvre est tout un art. Il faut attirer l’acheteur pour ses goûts, son intérêt pour l’art et l’envie de se constituer un patrimoine artistique mais également réaliser des économiques d’impôts.
Vous devez donc préparer et soigner votre argumentation et anticiper les questions fiscales qui se poseraient. Cette fiche a été rédigée pour vous y aider. Mais, sachez que nous pouvons également vous accompagner dans les échanges avec votre client pour éclaircir certains points qui demeureraient obscurs.
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Une reconnaissance officielle de compétence spécialisée :
En décembre 2020, Eric HAINAUT, associé-fondateur, a eu l’honneur de se voir reconnaitre officiellement la compétence spécialisée en activités culturelles, créatives et artistiques par l’Ordre des Experts-Comptables d’Ile-de-France.