La Gestion comptable et fiscale des stocks de disques dans les entreprises de production phonographique
Introduction
Créer et gérer une entreprise de production phonographique nécessitent la connaissance du métier : choix des artistes, format d’édition, plan éditorial, enregistrement, mastering, production, distribution et promotion.
On n’y pense pas instinctivement, mais le monde du disque nécessite aussi une parfaite connaissance des spécificités fiscales et comptables de ce secteur.
Ainsi, et ce sera l’objet de cette fiche expert, le producteur devra maîtriser :
- La détermination des coûts de production des disques,
- La mise en place d’une comptabilité analytique,
- La gestion des stocks et leur dépréciation,
Nous aborderons tour à tour ces différents points qui sont souvent interdépendants et qui au-delà de leur mise en place souvent simple, deviennent de vrais outils de gestion et de pilotage de l’activité de producteur phonographique.
I. La détermination des coûts de production des disques
Il est impératif pour un disque de connaître le prix de production d’un phonogramme.
Attention, nous ne parlons pas ici du coût de production du master qui fait l’objet d’une immobilisation incorporelles (à voir dans une autre fiche Expert) mais bien du coût de revient du produit fini qui sera vendu avec les frais de pressage et de conception du support (boîtier, jaquette…).
Cette étude, s’il la réalise souvent à priori pour calculer son seuil de rentabilité et déterminer les quantités à produire et à vendre, le producteur ne prend pas toujours l’habitude de la consolider lorsque le disque est terminé.
Pourtant ce prix de revient est celui qui servira à la valorisation des stocks et permettra ainsi de calculer les provisions pour dépréciation.
Sans obligation de formalisme particulier, la détermination du prix de revient d’un disque se fera généralement à l’aide d’un tableur Excel.
Les charges à prendre en compte dans le prix de revient sont les suivantes :
- Création de la jaquette, la pochette et le livret interne (dont création graphique, photographie ou illustration),
- Coût de pressage,
- Coût du support (pochette, boîtier, digipack, coffret…),
- Certains frais internes,
- Les droits d’auteurs lorsqu’ils sont réglés au forfait (cas rare),
- … (liste non exhaustive)
À partir des quantités livrées, il est possible de déterminer le prix de revient unitaire de chaque disque.
Attention, en cas de réédition, certains coûts ne reviendront pas : il faudra veiller à créer un second coût de revient dit de « retirage » qui fera l’objet d’une seconde ligne sur l’inventaire du stock.
En cas de sortie sur plusieurs supports (vinyle, coffret, version collection …) chacun de ces formats constituera un produit différent dont certains frais communs seront à répartir.
Les prix sont à retenir en HT.
Il n’est pas possible d’inclure dans ce prix de revient les coûts concernant les actions de communication (attaché de presse, tiré à part, achat d’espace pub).
Le mieux est de créer pour chaque disque, une fiche d’identification comptable.
Voici un exemple sommaire de fiche de détermination de prix de revient :
Les prix de revient de ce premier tableau seront repris dans le tableau d’inventaire des stocks pour sa valorisation.
II. La mise en place d’une comptabilité analytique
On peut remarquer que rechercher les éléments du prix de revient d’un disque peut s’avérer fastidieux, d’où la mise en place d’une comptabilité analytique.
Il faut d’abord comprendre ce qu’est une comptabilité analytique pour en mesurer l’importance dans le processus de pilotage d’une entreprise.
La comptabilité analytique est un mode de traitement des données comptables qui permet par l’attribution d’un code section sur chaque écriture de charge ou de produit de l’entreprise, d’avoir une vision par projet de l’activité.
Ainsi, si le producteur phonographique importe, sur chaque achat ou vente, un code section du disque en question, il sera possible d’éditer de façon transversale, la section d’analyse des coûts de ce disque, qui se substituera en grande partie aux éléments du tableau de détermination du prix de revient d’un disque.
Il ne reste plus qu’à indiquer les quantités livrées et déterminer le coût unitaire.
Ces sections analytiques serviront également aux travaux préparatoires du bilan.
Enfin pour maximiser le pilotage de l’entreprise, il sera aussi possible d’élaborer des sections par activité.
Exemple : Le producteur de disque voudrait connaitre la répartition de ses activités car il est producteur à la fois de Reggae, de Musique Classique et de Hard Rock.
Pourquoi ne pas élaborer la typologie de section analytique suivante :
- Reggae : R001, R002, R003……
- Musique classique : MC001, MC002, MC003….
- Hard Rock : HR001, HR002, HR003…
Ainsi en sus de connaître la marge par disque, de pouvoir déterminer les prix de revient unitaire, il sera possible de consulter la marge d’un pôle d’activité en éditant par exemple tous les chiffres de la section HR.
La mise en place d’une comptabilité analytique doit être pensée et réfléchie avant son utilisation. Elle doit devenir un outil et non une contrainte.
Grâce à l’informatique, la comptabilité s’exporte sur Excel et permet ensuite tous les calculs.
III. La gestion des stocks et leur dépréciation
L’art L123-12 du Code de Commerce oblige à contrôler par inventaire au moins une fois par an, l’existence et la valeur d’actif du patrimoine de l’entreprise.
Sur ce point au moins tout est clair.
Ce qui l’est moins, c’est qu’il ne s’agit pas de compter mais de contrôler que la valeur qui est inscrite en comptabilité est la même que celle qui apparait dans l’inventaire physique, à défaut d’ajuster l’inventaire comptable.
Que ressort-il de tout ceci ?
- Qu’il doit exister un inventaire physique des disques,
- Qu’il doit exister un inventaire comptable des disques,
- Que l’inventaire comptable et physique doit être valorisé.
Sur la valorisation, nous avons vu précédemment comment calculer le prix de revient unitaire d’un disque.
Sur chaque ligne de son inventaire, il s’agira alors d’indique ce montant pour valoriser son stock.
Il est impératif d’utiliser son stock en retrouvant la traçabilité des disques en fonction :
- Des quantités livrées,
- Des quantités données (presse, cadeau …)
- Des quantités défectueuses
- Des quantités vendues,
- Des retours,
- Du stock réel
- ….
Voici un exemple sommaire de tableau des stocks :
Ce tableau nécessite certains contrôles comme par exemple :
- Qu’il n’existe aucune valorisation négative,
- Que la quantité donnée ne soit pas excessive (car les impôts pourraient requalifier ceci en ventes non déclarées),
- Que s’il y a des différences entre l’inventaire physique annuel et cet inventaire appelé aussi « inventaire permanent », il faudra opérer des corrections… mais également rechercher l’origine des écarts (erreur de livraison, défaillance du comptage, vol !….)
Ce tableau permet également de valider les stocks qui vont arriver à 0 et de réfléchir à un réapprovisionnement.
Enfin, ce tableau va permettre de valider certaines références qui sont en fin de cycle de commercialisation et qu’il faudra soit détruire pour les sortir des stocks soit provisionner au bilan pour les passer en charges en les considérant comme non commercialisables.
Conclusion
Tous ces points évoqués vous précisent l’importance pour un producteur de disque de concilier rigueur et organisation administrative, juridique, fiscale et sociale. en plus de son organisation commerciale et éditoriale,
Une personne dédiée à ces tâches est souvent un impératif en plus de l’Expert-Comptable qui saura vous conseiller et vous accompagner dans le choix de la mise en place de l’analytique, la gestion des stocks, leur dépréciation et les écritures du bilan.
Emargence et son pôle dédié aux Industries Culturelles, Créatives et Artistiques, accompagnent de nombreux producteurs phonographiques et sont au fait de toutes ces problématiques. Ils sauront être réactifs et de bon conseil.
N’hésitez pas à les consulter.
Par ailleurs, travaillant avec de nombreux partenaires tels qu’avocats ou assureurs, ils formeront une « team » gagnante pour votre activité.
Questions réponses :
Il nous a paru utile de finir cette fiche par deux questions / réponses qui reviennent fréquemment sur les réseaux sociaux concernant les stocks de disques.
- Peut-on donner des disques ?
Oui si c’est pour une raison promotionnelle comme par exemple à des journalistes, des attachés de presse, des radios…. Mais cela doit rester raisonnable sinon l’administration considérera que ce sont des ventes déguisées et vous redressera sur un chiffre d’affaires fictif.
Dans certains cas, le don est possible mais il faut qu’il y ait un motif. Par exemple une association culturelle pour promouvoir la musique dans un pays défavorisé, une médiathèque….
- Peut-on vendre à perte ?
La loi (Art L. 442-5) interdit la vente à perte mais au regard du prix de revient ; cela laisse une large latitude quant à de grosses remises possibles. Il existe 7 exceptions
- Ventes volontaires ou forcées motivées par la cessation ou le changement d’une activité commerciale => peut concerner le disque !
- Fins de saisons ou entre deux saisons de vente => ne concerne pas le disque
- Obsolescence technique ou produits démodés => peut concerner le disque !
- Réapprovisionnement à la baisse => ne concerne pas le disque
- Alignement sur un prix plus bas légalement pratiqué dans la même zone d’activité par les magasins dont la surface de vente n’excède pas 300 m2 pour les produits alimentaires et 1000 m2 pour les produits non alimentaires => ne concerne pas le disque
- Produits périssables menacés d’altération rapide => ne concerne pas le disque
- Produits soldés mentionnés à l’article R. 310-3 du Code de commerce => peut concerner le disque !
Pourquoi travailler avec Com'Com ?
Fort d’une expérience de plus de 20 ans, Com’Com est le leader de L’EXPERTISE COMPTABLE ET RH spécialisée qui accompagne le spectacle vivant, les producteurs et éditeurs phonographiques, le cinéma et l’audiovisuel, les artistes auteurs et interprètes, les freelances, le jeu vidéo, le multimédia….
Une reconnaissance officielle de compétence spécialisée :
En décembre 2020, Eric HAINAUT, associé-fondateur, a eu l’honneur de se voir reconnaitre officiellement la compétence spécialisée en activités culturelles, créatives et artistiques par l’Ordre des Experts-Comptables d’Ile-de-France.