Le portage salarial dans le spectacle : est-ce légal ?
- Sommaire
- I. Définition du portage salarial
- II. Retranscription de la loi auprès des entreprises des secteurs Culture & Média
- III. Le portage salarial comme activité exclusive
- IV. Incompatibilité entre l’activité de portage salarial et l’embauche d’ouvriers et techniciens du spectacle
- V. L’embauche d’artistes du spectacle
N°14 | novembre 2015
Depuis plusieurs années, une loi légalise le portage salarial. Les règles juridiques relatives au portage salarial n’étant pas précises, se pose l’interrogation de la légalité de l’emploi de salariés artistes et techniciens, intermittents du spectacle, par des sociétés de portage.
Nous reprenons ci-dessous la définition du portage salarial et son application aux artistes et techniciens du spectacle
I. Définition du portage salarial
Le portage salarial peut se définir comme une relation triangulaire entre une société de portage, un salarié, le « porté », et une entreprise cliente.
Le portage salarial se caractérise par :
- La prospection des clients et la négociation de la prestation et de son prix par le porté,
- La fourniture des prestations par le porté à l’entreprise cliente,
- La conclusion d’un contrat de prestation de services entre le client et la société de portage,
- La perception du prix de la prestation par la société de portage qui reverse un salaire au porté dans le cadre d’un contrat de travail.
II. Retranscription de la loi auprès des entreprises des secteurs Culture & Média
Pour préciser les termes de la loi du 25 juin 2008, un accord relatif à l’activité de portage salarial a été signé le 24 juin 2010, par le PRISME, organisation employeur du travail temporaire, et quatre des cinq organisations syndicales représentatives au plan national et interprofessionnel. Cet accord (non étendu et donc non applicable à ce jour) prévoit, notamment, que la société doit exercer de manière exclusive, l’activité de portage salarial.
À cet égard, l’UNEDIC, puis le Ministère de la Culture, ont ajouté que pour une entreprise qui dispose, au titre d’une réelle activité de production, d’une licence d’entrepreneur de spectacles vivants, celle-ci ne vaut pas pour autrui, ce qui est le cas si cette entreprise exerce une activité de portage.
Cette lettre précise également qu’ « à cet égard, ilest demandéd’examiner avec la plus grande attention les dossiers de renouvellement de licence qui feraient apparaître une grande diversité d’activités, une disproportion entre la programmation réalisée et les déclarations sociales présentées, et une programmation incertaine ».
Nous pouvons donc en déduire qu’une société de production de spectacles ne peut pas, en principe, exercer, parallèlement, une activité de portage salarial.
Il semble possible pour les sociétés de production de maintenir une activité de portage salarial, tant que l’accord du 24 juin 2010 n’est pas étendu et/ou qu’une loi est votée en ce sens. Mais cette solution reste cependant risquée, car la DRAC pourrait refuser aux sociétés de production le renouvellement de leurs licences d’entrepreneur de spectacles.
III. Le portage salarial comme activité exclusive
Il ressort des textes précités que les sociétés de portage salarial doivent désormais avoir pour unique activité, le portage salarial, un objet social et un Code NAF correspondant à cette activité.
Par conséquent, les sociétés de portage salarial peuvent, désormais, embaucher uniquement des artistes, mais plus d’ouvriers et de techniciens du spectacle.
IV. Incompatibilité entre l’activité de portage salarial et l’embauche d’ouvriers et techniciens du spectacle
Les techniciens du spectacle, pour percevoir leurs allocations chômage, doivent justifier d’un travail pour une société possédant un code NAF spécifique, relevant de la production audiovisuelle, la radiodiffusion, l’édition musicale ou audiovisuelle ou les arts du spectacle vivant.
Il s’agit notamment des codes NAF suivants :
- 59.11 B : production de films institutionnels et publicitaires,
- 59.20 Z : Enregistrement sonore et édition musicale,
- 60.10 Z : Radiodiffusion,
- 60.20 A : Édition de chaînes généralistes,
- 90.02 Z : Activités de soutien au spectacle vivant et détention du label prestataire de services de spectacle vivant,
- Etc.
Une société de portage salarial doit exercer de manière exclusive ceyye activité. Elle ne peut donc pas avoir un code NAF correspondant aux activités citées ci-dessus.
De ce fait, il y a incompatibilité entre la qualité d’ouvrier ou de technicien du spectacle et leur embauche par des sociétés de portage salarial.
Si certaines sociétés, dont l’activité déclarée est la production, mais dont l’activité effective est le portage salarial, employaient jusqu’à présent, des ouvriers et techniciens du spectacle sous un Code NAF de sociétés de production (audiovisuel, spectacle), un tel « montage » semble aujourd’hui imprudent, compte tenu des règles en vigueur et dans l’hypothèse de l’extension de l’accord du 24 juin 2010 par le Ministre du travail.
V. L’embauche d’artistes du spectacle
Dans l’état actuel du droit, les sociétés de portage salarial ne peuvent engager que des artistes et ne peuvent plus « porter » d’ouvriers et techniciens du spectacle.
En outre, les artistes faisant appel à une société de portage salarial, doivent être indépendants dans leur activité. Ils doivent notamment définir eux-mêmes leurs prestations de spectacle et remplir les conditions de rémunération, d’expertise et d’autonomie de négociation de leurs prestations.
Afin que les artistes « portés » soient éligibles aux allocations chômage du spectacle, les sociétés de portage salarial doivent respecter les critères de la circulaire UNEDIC du 7 novembre 2011 ; les salariés bénéficient du statut cadre et d’une rémunération minimale de 2.900 euros bruts mensuels sur la base d’un temps plein.
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